jeudi 29 septembre 2011

Frédéric Touchard - Nu rouge

Éditeur : Arléa - Date de parution : Août 2011 - 201 pages

Terminant sa thèse sur  Edouard Pignon, Camille décide de se rendre  dans la région du peintre. Elle veut découvrir ce  Nord-Pas-de-Calais, celui qui l’a inspiré pour ses toiles : ses couleurs, son atmosphère, ses habitants et comprendre le démarche de l’artiste.  Elle rencontre Jean qui devient son guide et qui tombe peu à peu amoureux d’elle.

A seize ans, Edouard Pignon, natif de Bully-les- Mines, descend au plus profond du puits de la houillère. La noirceur du minerai, l’absence de lumière, bien plus que le bruit et l’atmosphère étouffante, chargée de fines particules d’anthracite, lui feront fuir le labyrinthe des galeries de la mine. Désertant les sous-sols carbonifères, il deviendra ce peintre avide de formes, de couleurs et d’énergie, en quête de la réalité (écrira-t-il). Près de soixante plus tard, Edouard Pignon inventera les nus rouges – chairs incandescentes envahissant l’entière surface de la toile, et d’entre tous le plus solaire le sommeil écarlate. Un champ d’amour. 

Ce livre s’ouvre sur ces lignes et d’emblée, on comprend le titre, l’importance de la peinture mais surtout celle de cette région du Nord. Avec cette phrase magnifique : « Le Nord est ce corps sculpté par l’effort de ceux qui y souffrirent ». Une phrase qui en dit long sur les corps usés par un travail physique dans des conditions d’une autre époque. Edouard Pignon naquit en 1905 et Camille part sur ses traces. Les lieux où il vécut,  des paysages où les stigmates d’une production ancienne sont présents. Anciens bâtiments  d’une activité minière et de celle du textile dont le Nord pouvait s’enorgueillir.  Camille n’était pas préparée à découvrir cette région sous un aspect autre que celui du peintre. Rattrapée par la réalité sociale et économique, elle veut aider  à sa façon. Lutter dans ce paysage où la pauvreté s’est installée. Raconté par Jean,  le récit m'a le plus intéressé quand il décrit cette région qu’il aime et qu’il porte en lui. Camille semble en permanence distante et je n'ai pas réussi à la cerner. Ou alors trop tardivement. 

Un premier  roman qui aurait gagné en profondeur et en tenue, à mon sens, sans des digressions inutiles. Je n’ai pas réussi à m’attacher à Camille  et j’ai trouvé la fin du livre précipitée. Par contre, les descriptions de cette région m’ont parlée, des descriptions qui confèrent une âme à la nature. On ressort de ce livre avec un regard différent sur le Nord. Derrière le gris se cache le rouge d'Edouard Pignon...

Merci à News Book pour ce partenariat !

Les billets de Catherine, CathuluDes livres et moi  

mercredi 28 septembre 2011

Catherine Mavrikakis - Le ciel de Bay City

Éditeur : 10-18 - Date de parution : Août 2011 - 250 pages

Etats-Unis, Années 70, dans la petite ville de Bad City, Amy grandit dans une maison où le bonheur n’est que d’apparat. Un accroche l’œil comme sa mère et sa tante savent le faire. Elles qui ont vécu  leur enfance en France ont fui aux Etats-Unis pour essayer d’oublier. Oublier leur famille morte dans les camps, gommer  leur racines juives jusqu’à les effacer. Mais Amy porte en elle le poids du passé. Un poids trop lourd qui la hante et l’obsède.

Je ne sais pas comment vous parler de ce livre tant cette lecture a été éprouvante et paradoxalement très prenante. Eprouvante car ici s’opposent les stéréotypes de la famille américaine au poids de l’Histoire. Dans une écriture fulgurante, Catherine Mavrikakis nous renvoie en pleine figure la folie des hommes : l’holocauste, la Shoah. Une folie sphérique dont Amy se trouve au centre, folie qu’elle encaisse et qu’elle porte bien des années plus tard. Née sous le ciel mauve de Bay City, Amy ne sera pas une américaine souriante et insouciante. Pour elle, ce ciel porte en lui la voix des morts : "Le ciel de l’Amérique est bleu, saignant. C’est une plaie béante, une hémorragie". Ses origines polonaises juives qu’elle découvre la hantent, origines que sa mère a tu à tout jamais et dans lesquelles sa tante a vu un pêché. Oubli de deux femmes pour tenter de se reconstruire et de se conformer aux standards américains. Nourrie des souvenirs qu’elle réinvente, elle rejette le présent et  hait son existence. Amy devient adulte le jour où la maison brûle et sa famille également. Rescapée volontaire d’un incendie qu’elle a prémédité, elle renaît.


Alternant la vie d’adulte d’Amy qui est mère à son tour et cette vie menée à Bay City, Katherine Mavrikakis dans une écriture qui n’a pas froid aux yeux nous interpelle sur la mémoire et l’oubli. Sans se faire donneuse de leçon. Non, elle laisse le soin à  chacun d’en retirer ce qu’il désire ou non.  

Alors oui, cette lecture a l’effet d’un électrochoc, c’est certain et je ne suis pas prête de l'oublier. Et si par moment, j'ai eu l'impression de perdre pied face à la haine d'Amy,  il s'agit d'une lecture qui m'a apportée quelque chose. 

L’Amérique est une fête, mais elle se change aussitôt en commémoration funèbre. Tout ici  vire au tragique sans crier gare. Mais on oublie, on repart pour un autre tour. La machine à leurre se met en marche. Le ciel mauve des hivers et des étés du Nord est  si rassurant. Il témoigne de la prospérité de notre économie. Sa toxicité est la garantie de notre esprit de conquête, de notre réussite industrielle.


Le billet de Margotte 

lundi 26 septembre 2011

Jean-François Chabas - La femme-nuage

Éditeur : Ecole des loisirs (collection Medium) - Date de parution : septembre 2011 - 78 pages magnifiques !

Vâ, une jeune fille, s’envole à la moindre émotion. Doit-elle écouter son  cœur  ou l’assécher de tout sentiment ? Le Dévorateur est celui « qui perdure, vengeur, au cœur de la planète Terre ». Il veut rétablir la justice et punir ceux qui le méritent. Enfin, Glas est un Géant qui habite au fond d’un lac. Il veille sur les eaux sauvages dans les montagnes. Un jour, il recueille Lynianata, une jeune orpheline perdue. Sa vie va s’en trouver modifiée à tout jamais.  

J’ai lu et  relu ces trois contes car l’écriture poétique, riche  m’a conquise par sa magnificence. Dans un style où chaque mot est pesé, où chaque tournure de phrase est un délice, Jean-François Chabas aborde des thèmes essentiels. Dans ce recueil, le conte permet non  seulement d’entrer dans un univers où les frontières entre réalité et onirisme se chevauchent. Mais surtout, il amène le lecteur  de 13 à 109 ans à la réflexion!  Et,  si Fifille de treize ans et demi n’était pas très enthousiaste au départ pour le lire ( « oh, les contes c’est pour les petits! »), au final, elle a beaucoup aimé et elle a revu son jugement. Pour ma part, j'ai été subjuguée…  D’ailleurs, je le garde sur ma table de chevet pour pouvoir me délecter encore juste par plaisir. J'ai eu un coup de cœur  pour Le Dévorateur qui n’est pas sans rappeler une des nouvelles du livre Les oliviers du Négus de Laurent Gaudé (qui fait partie de ma PAC (Pile à Chroniquer)). Alors oui, je suis peu bavarde parce que devant une telle écriture, je ne peux que dire chapeau bas et vous inviter à la savourer !

Ma rage entretiendra ma rage, je songerai aux millions de blessures infligées, aux cœurs étroits n’ayant jamais rien livré, à l’ivresse imbécile des batailles, aux eaux salies, aux terres souillées, à l’air empuanti de gaz méphitiques, aux engins volant dans l’espace pour de nombreuses raisons futiles, et j’enflerai encore lorsque je me pencherai sur les pays arides où meurent les nourrissons avant que d’avoir pu marcher. Où on est vieillard, avant d’avoir été adulte. Je retournerai mon ire contre ceux qui ne les aidèrent pas, qui acceptèrent avec indifférence leurs maladies, leur faim, et leur disparition. 

Et,  un livre hérisson supplémentaire !
  

dimanche 25 septembre 2011

Emma Donoghue - Room

Éditeur : Stock - Date de parution : Août 2011 - 400 pages dévorées!

Jack va fêter ses cinq ans. Il n'y a pas  de fête de prévue avec des amis de son âge non juste sa maman. Il ne connaît qu’elle et la chambre dans laquelle ils vivent en permanence. Vingt-quatre heures sur vingt -quatre. Certains soirs, pendant qu'il dort, le Grand Méchant Nick rend visite à sa maman.  Maintenant qu’il a cinq ans, sa mère décide de lui avouer certaines choses sur les mondes qu’il voit à la télé. Elle va mettre au point un plan d'évasion et ils vont réussir à s’échapper.

J’ai été scotchée par ce livre et j'ai juste envie de vous dire : lisez-le ! Raconté par Jack âgé de cinq ans, j’avais une appréhension de me lasser du langage d’un enfant. Et bien,  non ! Dans les  cent cinquante premières pages,  on découvre les conditions de vie de Jack et de sa mère. Hallucinant et terrifiant. Jack ne connait que leur chambre minuscule avec comme seul vue sur l'extérieur une lucarne sur le toit. Sa mère a déployé depuis sa naissance  des trésors d’ingéniosité pour qu’il soit comme un autre petit garçon. Alors, Jack fait de l’exercice, joue et sait lire. Il ignore tout du monde normal et vit une relation fusionnelle avec sa mère. Jack est le fruit du viol de sa mère séquestrée depuis sept ans et elle le protège. Sa mère élabore un plan d’évasion qui doit d'abord permettre à Jack de s'échapper. Et à ce stade du livre, je peux vous assurer que j’étais comme une pile électrique tellement j’avais peur qu'il échoue. La suite du roman nous raconte la découverte du monde par  Jack, ses peurs  et celle de sa mère. Un apprentissage loin d’être facile pour lui comme pour sa mère qui est quelquefois jugée...Je n'en dis pas plus pour que soyez à votre tour balayé d'émotions.

Il s'agit d'un livre sans voyeurisme ou pathos et d'une intensité rare! J’ai été tenue en haleine, sonnée, attendrie et chamboulée par tout l’amour qui s’en dégage! 

samedi 24 septembre 2011

Manu Larcenet - Le combat ordinaire

Éditeur : Dargaud - Date de parution : 2010 - 208 pages et un coup de cœur ! 

Lassé de couvrir les évènements, Marco s’accorde une pause dans son métier de photographe. Trentenaire, il est en proie à de nombreuses angoisses.  Il se cherche dans la fumée des pétards, les promenades solitaires ou chez son psy. Mais le combat ordinaire c'est  aussi un chantier naval qui ferme et qui licencie à tours de bras, la guerre d’Algérie et la gangue de silence qui l’enveloppe, les difficultés sociales, la maladie d’Alzheimer, les relations père-fils, le deuil, ce que l’on appelle devenir adulte sans oublier l'amour et l'amitié.

Je sais, il s’agit de la  première fois que je parle de BD  sur ce blog. Pour la simple et  bonne raison  que je n’en lisais pas. Bien sûr, j’en ai  feuilleté  dans mon enfance (à cette époque reculée, l’enfance allait au moins  jusqu’à 12 ans) mais depuis nada ! Et pour mon entrée dans ma quatrième décennie,  Canel a décidé qu’il était plus que temps que je me replonge dans les bulles.  Je  ne peux que la remercier ! J'étais loin de m'imaginer qu' à la la lecture d'une BD on pouvait avoir une boule d’émotion dans la gorge. Ou que les dessins  sont  quelquefois plus parlants que les mots … et bien, j’ai eu tout faux! Mea culpa sept fois. Il s’agit d’un coup de cœur ! Les dessins, les textes  dégagent autant de puissance qu’un roman et j’ai eu à plusieurs reprises les yeux embués. Mon préféré ? Le tome 3  pour lequel j’ai versé quelques larmes. La conclusion s'impose d'elle-même : ne jamais dire jamais...

Canel a rédigé un billet pour chaque tome, le billet de Théoma renvoie à d’autres liens.

jeudi 22 septembre 2011

Louis Bayard - L'héritage Dickens

Éditeur : le Cherche Midi - Date de parution : Septembre 2011 - 389 pages à ne pas rater !

Londres, 1860, Tim Cratchin trouve un emploi de précepteur dans une maison close. Il apprend à lire et à écrire à la tenancière Mme Sharpe en échange du gîte et du couvert.  Vivotant, malgré la rente mensuelle que lui verse son oncle, il aide également de temps en temps  le capitaine Gully à repêcher les cadavres dans la Tamise. Les rues de Londres ne sont pas sûres et Tim découvre le corps d’une fillette d’une douzaine d’années marquée de la lettre G.Ce  corps n'est que le premier...

Tim Cratchin, ce nom vous titille? Ne cherchez pas plus loin ! ll s’agit bien du personnage célèbre issu d’un conte de Noël de Dickens.  Et là si vous paniquez parce que vous ne l’avez pas lu, je vous rassure : moi non plus (mais j’ai vu des adaptations au ciné). Tim est désormais âgé de vingt-deux ans et orphelin. En tout cas, nul besoin d’avoir une machine à remonter le temps pour se sentir  à Londres aux côté de Tim (ou de Monsieur Timothy). L’écriture très visuelle de Louis Bayard nous donne vraiment l’impression d’y  être! On voit le brouillard tomber,  les ruelles malfamées et  les échoppes, on entend les cochers huer les chevaux. Vous l’aurez compris, il s’agit d’une immersion totale ! Le récit est émaillé des souvenirs de Tim concernant son père dont il imagine souvent la présence.  Aidé par Colin un garçon des rues poussant  la chansonnette, il parviendra à résoudre l'énigme de cette affaire. Si j’ai trouvé l’intrique  assez légère dans son ensemble,  certains points  m’ont fait quand même  réagir : l’âge des victimes et à ce quoi elle étaient destinées.  Mon bémol est largement compensé par l’écriture relevée qui émoustille les neurones.  Raconté par le jeune homme, cette histoire se lit toute seule. Et cerise sur le gâteau : il y a de l’humour ! 

J’allais dire un bon roman mais il s’agit d’un policier … L’un ou l’autre,  un livre à ne pas rater  ! 

Une LC avec Keisha qui, je le sais, a été transportée à Londres elle-aussi !

Mr. Sheldrake  est ébranlé par cette brutale sincérité. S’affaissant sur le siège le plus proche, il fouille dans ses poches à la recherche d’une flasque en argent ( « Citron vert à l’eau de Seltz », dit-il), qu’il vide en moins d’une seconde. Avec la double et paradoxale conséquence  de le ranimer et le rembrunir à la fois, et nous ne saurons donc pas, au juste, comment il prévoit de traiter mon affaire. Notre seule certitude est que, avec son sourire torrentiel, il serait capable de liquéfier le soleil.  


mercredi 21 septembre 2011

Isabelle Pestre- La onzième heure

Éditeur : Belfond - Date de parution : Septembre 2011 - 188 pages

Eté 1988. Comme chaque année, Lisbeth et ses parents sont en vacances à Saint-Sernin, une petite station balnéaire de la Charente-Maritime. Cet été, ses parents ont engagé une jeune fille pour s’occuper d’elle. Lisbeth est une enfant solitaire mais à onze ans, elle comprend et déchiffre les sous-entendus des remarques acerbes de ses parents. 

Venue au monde tardivement alors que ses parents s’étaient résolus à ne pas avoir d’enfant, Lisbeth est considérée comme un fardeau. Petit à petit, elle s’est enfermée dans son monde imaginaire. Sa mère ne la supporte pas et la trouve disgracieuse, empotée. Et , son père préfère battre en en retraite devant sa femme. Ignorée, en manque d’amour, Lisbeth semble s’être accommodée de sa situation. Valérie, la jeune fille engagée pour s’occuper d’elle la laisse souvent seule pour flirter. Lisbeth ne dit rien. Elle se promène le long de la plage qu’elle connait bien. C’est ainsi qu’elle rencontre Micha, un jeune immigré albanais d’une vingtaine d’années. Arrivé en France depuis six ans et sans attache, il ne sait que quelques mots de  français. Lisbeth lui apprend la langue tandis que Micha lui offre de l’attention. Ce sentiment nouveau la ravit. Une après-midi, Micha l’amène se promener en moto. Les heures passent et Lisbeth ne revient pas. 

L’histoire de Lisbeth, cette petite fille qui encombre ses parents est bien menée. Et, on ne peut être qu’indigné, écœuré quand on lit les propos de sa mère à son égard. Une situation d’autant plus révoltante que Lisbeth se tait. Elle apparaît résignée à ne plus obtenir d'amour ou simplement de l' attention. Aussi, quand Micha, ce jeune immigré clandestin,  lui accorde de la reconnaissance, elle ne peut qu’en éprouver une certaine fierté. Leur rencontre est celle de deux personnes en souffrance car Micha a le mal du pays et la réalité en France est différente du rêve. Lorsque Lisbeth part avec Micha et enfreint les consignes en quittant la plage, j'ai compris que cette relation innocente allait prendre une autre tournure. La tension s'installe et monte petit à petit en crescendo ! Je n'en dis pas plus...
Comme souvent pour un premier roman, l’auteure a voulu faire quelques effets de manche  surtout au début du récit. Mais, par la  suite, elle se débarrasse de ces quelques maladresses pour laisser place à une écriture très délicate et sensible. Par contre, la toute fin du roman soit  les dix dernières pages me sont apparues tirées par les cheveux...

Malgré quelques petits défauts,  ce livre a su me toucher  par son histoire et par l'écriture !

Cinq heures, c'est la onzième  heure, l'après-midi qui rêve au soir, un désespoir adouci et irrémédiable.  



mardi 20 septembre 2011

Linda Lê - A l'enfant que je n'aurai pas


Éditeur : NIL (collection  : les affranchis) - Date de parution : Août 2011 - 64 pages

Après avoir lu L'autre fille d’Annie Ernaux, Je pars àl'entracte de Nicolas d'Estienne d'Orves dans cette collection, le titre très fort de ce livre m’a interpellée. 

Dans cette lettre,  Linda Lê parle à cet enfant qu’elle n’aura pas. Même si son compagnon tente de lui faire changer d’avis, elle se barricade derrière sa propre enfance. Une enfance  marquée par une mère surnommée Big Mother. Et elle évoque un choix pris très tôt : «  déjà à l’époque, je me jurais de ne jamais être mère, pour ne pas donner à mes enfants l’éducation  que j’avais reçue ». Comme pour conjurer sa peur de reproduire  le schéma mère-fille, elle imagine un fils et non une fille.  Ces angoisses  de perpétrer des erreurs  sont tout à fait légitimes et je les ai comprises. Quand elle s’adresse à cet enfant et qu’elle l’imagine grandir, ce sont des passages beaux et  forts. Si criants d'amour que j’ai l’impression que malgré tout une part infime d’elle était  demandeuse de cet enfant. Il s’agit de mon ressenti qui est peut-être erroné.
En terminant cette lettre,  j’ai eu envie de dire à l’auteure : beaucoup de femmes avant de devenir mères (et probablement la majorité)  se sont posées des questions, certaines (dont moi) ont eu cette appréhension de répéter inconsciemment des erreurs. 

Je ressors surtout troublée de cette lecture car derrière les mots de Linda Lê, certaines blessures non  cicatrisées sont  palpables...

Une lecture commune avec Liliba qui nous a permis d’échanger au téléphone sur ce livre (et évidemment sur d’autres choses !). 
Et, un livre supplémentaire pour  le challenge d'Hérisson. 

Edit du 28/09 : 
Je voulais faire un complément à ce billet, celui de Manu m'en donne l'occasion .  Aun moment donné, ma santé ne m’a pas permise d’envisager d’avoir un autre enfant. Deux enfants, des ennuis de santé un re-mariage et tout de suite, il y eu cette question presque malsaine "à quand un enfant? ". Et ça fait mal, très mal quand on sait que l’on ne pourra pas à cause de ses problèmes de santé assumer une grossesse puis répondre aux besoins d’un nourrisson puis à ceux d'un  enfant.  Dans ce cas, c’est un choix forcé de taire son désir d’enfant. Les raisons médicales, les questions étant trop importantes : aggraver son état pour satisfaire ce désir d'enfant.  Et, il s'agit aussi d'une une très grande preuve d’amour envers cet enfant que l’on n’aura pas…

lundi 19 septembre 2011

Malika Ferdjoukh - Chaque soir à 11 heures

Éditeur : Flammarion - Date de parution : Septembre 2011 - 401 pages

Willa Ayre, lycéenne en classe de première, se trouve  insignifiante. Lorsque, Iago, le garçon pour lequel toutes les filles se pâment craque pour elle, elle n’en revient pas. Iago est le frère de sa meilleure amie Frans. Tous deux habitent dans un luxueux hôtel parisien. Lors d’une soirée organisée par Frans, Willa fait connaissance d’un garçon étrange Edern…
Fifille ado number two , 13 ans et demi ( je précise le "et demi" sinon je vais avoir le droit à des remarques) a dévoré ce livre ! Pendant deux jours, elle l’avait en permanence avec elle : au petit-déjeuner, dans le bus…Et, cette lecture a été un coup de cœur pour elle ! Pour ma part, au départ, vu la couverture, j’avoue avoir eu un peu peur de lire un harlequin pour adolescentes.   Et bien, détrompez vous !  Car à  mon tour, je l’ai dévoré et j’ai passé un bon moment de lecture !  L’héroïne Willa est une jeune fille intelligente, drôle et positive ! Ses parents sont divorcées, elle a pour meilleure Frans qui vit dans un milieu social très élevé et complètement différent du sien. Mais, elle n’est pas jalouse. Bonne élève, elle travaille ses cours. Bref, il s’agit d’une jeune fille qui a la tête sur les épaules. Et, ce livre n'est  pas qu’une histoire  d’amour et  d’amitié car on va tenter de mettre fin aux jours de Willa. Cerise sur le gâteau : tous les ingrédients sont bien dosés avec un humour  assez féroce. Voilà comment je me suis retrouvée à une heure tardive toujours plongée dans ce livre car je n’arrivais pas à le reposer...
Un roman enlevé, résolument contemporain, très bien construit et avec des personnages très attachants pour certains ! Je ne connaissais pas Malika Ferdjoukh, toujours est-il qu'elle vient de gagner deux adeptes !
Les billets de Cathulu, Lasardine, Hérisson et Stéphie qui le fait voyager. 

dimanche 18 septembre 2011

Rencontre et interview d'Eric Fottorino

Eric Fottorino à Brest le 15 septembre 2011.

On a tous un premier livre. Ce livre que l’on a commenté  sur nos blogs. Pour moi, il s’agissait de Caresse de rouge d’Eric Fottorino et c’était à l’époque où mon blog ne comportait que des billets d’humeur. Je me rappelle avoir écrit que j’étais à la plage tellement  absorbée par ma lecture que  je n’entendais  même plus  les mères qui appelaient les enfants ou les mettaient en garde. Sauf que je n’avais pas cité ni le titre du livre ni l’auteur ! Et, il s'agit de ce billet qui a permis que ce blog devienne ce qu’il est actuellement .
Jeudi dernier, j’ai pu rencontrer Eric Fottorino. Vous n’imaginez pas à quel point mon cœur  battait la chamade ! Un auteur que j’admire et dont j’ai beaucoup aimé en particulier : Caresse de rouge, Nordeste, Korsakov, Baisers de cinéma. Encore une belle  rencontre au cours de laquelle j’ai pu lui poser quelques questions.  
Eric Fottorino, vous êtes journaliste et  jusque décembre 2010 vous étiez directeur du journal Le Monde,   vous êtes également  écrivain  et  un passionné de la petite reine , comment faites-vous ?
En fait, l’ensemble constitue ma vie. Je me suis inventé  une vie où je pouvais donner  libre cours au journalisme  même ci cette fonction  a évolué par la suite. Le vélo participait à mon équilibre  et me permettait de tenir le coup physiquement.  En ce qui concerne l'écriture, l’envie d’écrire ne m’a jamais quitté car  j’ai toujours eu la sensation d’avoir des choses à dire.  Et j'ai essayé de mener les trois de concert durant toutes ces années.
Justement si l’on se penche sur  vos livres, vous touchez à différents genres : la fiction, l’autobiographie. Vous n’avez pas de domaine de prédilection précis?
Oui, je touche à différents genres. Mais, depuis la publication de mon premier roman Rochelle  dans les années 1990 jusqu’à Dos crawlé qui vient de sortir, il y a des thèmes récurrents : l’enfance, la quête du père ou de la mère, la relation entre l’enfant avec  l'un de ses parents. Ce sont des genres et des univers différents mais avec quelques  fils rouges comme celui de l’enfance ou de l’identité. Par exemple, Nordeste met en scène un vendeur d’enfant et  dans Caresse de rouge il s’agit d’un père qui devient  une mère.
Quel est votre  regard sur les blogs en  tant que journaliste et en tant qu’auteur ?
Pour moi, le blog est l’expression libre de quelqu’un qui dans le domaine des livres,  exprime un point de vue,  un goût en n’ayant aucun lien avec le milieu littéraire. En tant que journaliste, je trouve que le blog ajoute  une corde supplémentaire à la critique littéraire souvent classique dans sa forme. La liberté de ton d’un blog  et son  côté personnalisé ajoute un nouveau point de vue utile au lecteur.  En tant qu’écrivain,  je considère que la grande difficulté  pour un livre est de trouver son public. Même si j’écris depuis vingt ans, à chaque nouveau livre, je me remets en jeu. Et pour un écrivain, le blog est une chance supplémentaire, une force nouvelle d’être connu. Parce qu’il s’agit uniquement des goûts du blogueur et parce que le blog est totalement indépendant de tout autre critère.
Maintenant  que vous avez plus de temps libre, y a t-il une troisième passion qui va venir se greffer à l’écriture et  au vélo ?
Non, car ces dernières années je n’ai pas pu consacrer autant de temps que je l’aurais souhaité à l’écriture. Dans les mois et les années à venir, je vais pouvoir faire aboutir des projets littéraires plus ambitieux qui  permettent d’approfondir la complexité des êtres  humains et du monde dans lequel nous vivons. Et il faut du temps et ce  temps, maintenant, est devant moi.

Un énorme merci  à Eric Fottorino  pour sa gentillesse, son écoute et  son humilité. Comme d’habitude, cette rencontre s’est réalisée grâce à Clémence de la librairie Dialogues.  Et n’oubliez pas que d'ici quelques jours vous pourrez visualiser une interview complète d’Eric Fottorino sur le site de Dialogues !

samedi 17 septembre 2011

Emmanuelle Urien - Tous nos petits morceaux

Éditeur : NOIR SI BLEU - Date de parution : Septembre 2011 - 175 pages de pur bonheur !

Si vous aviez rangé Emmanuelle Urien dans la catégorie nouvelles à chute, et bien,  vous pouvez vous mordre les doigts. Celle qui m’avait régalée avec son écriture mordante et ses fins renversantes réussit un  véritable tour de force.  Celui de se renouveler ! Et elle le réussit haut la main! Avec une écriture où les phrases virevoltent et accrochent l’œil, elle nous promène entre plusieurs époques. On y croise un médecin,  une femme qui décide de rentrer au couvent ou encore une jeune maman… et des miroirs. L’objet recueille les confessions, imagine, contemple et raconte. Il capte les pensées, sonde les cœurs et les âmes de celui ou celle  qui se regarde. Et quand les glaces sans tain, bien qu'impuissantes, ont la faculté de penser, une voix surgit. Plus qu'un double-je, le miroir révèle les blessures profondes et les failles.
A chaque nouvelle, on découvre le personnage dans une situation par le biais du miroir. Cette narration instaure une intimité. Et comme c'est Emmanuelle Urien, elle creuse au plus profond et nous amène là où c'est sensible. Au final, ça peut faire mal, très mal...L'écriture est bonifiée, enrichie d’une palette de nuances subtiles sans perdre ce piquant, cette touche qui est  propre à Emmanuelle Urien. L’auteure se fait psyché de l’âme humaine et  je suis tout simplement épatée !
Alors oui, j’y ai inséré plein de marque-page et j’ai relu des passages rien que pour le plaisir ! Du pur bonheur qui donne un livre hérisson. Et après cette lecture, je peux vous assurer que vous regarderez différemment votre miroir…
Elle murmurait, nous disait  qu’elle avait déjà fait cela, il y a longtemps, quand  elle était petite fille, sous une véranda encombrée de plantes vertes. Un puzzle de lumière. Des souvenirs heureux. Un miroir aux alouettes.

mardi 13 septembre 2011

Sophie Fontanel - L'envie

Éditeur : Robert Laffont - Date de parution : Août 2011 - 160 pages


Quand le corps ne veut plus, le désir se tarit. Cela pourrait être aussi simple.Sauf qu'il y a le regard des autres. L'auteure raconte  sa vie d’abstinente consentante. A une époque où le sexe est considéré comme un produit de consommation courante et/ou comme un kleenex, Sophie Fontanel  assume son choix à un moment donné. Et, elle revendique le droit de se sentir bien.

Accepter que son corps ne crie plus à l’envie et oser dire le mot bien-être : voilà un  pavé  dans la mare ! Sophie Fontanel brise une image souvent imposée. Celle que toute femme célibataire doit forcément avoir une vie sexuelle épanouie, foisonnante de compagnons éphémères (et le tout si possible, bien entendu, sans sentiments).  Dans un style aux tournures délicates,  l’auteure nous parle de choix assumé, du regard inquisiteur, de la méfiance et de ses propres doutes de départ (mince, je me sens bien, est-ce normal ? ).  Ces tableaux anecdotiques m'ont plus ou moins intéressée. J'aurai aimé que l'auteure explore davantage son constat. Celui de notre société pointant du doigt facilement son mode de vie à un moment donné. Par la suite, j’ai trouvé que l’auteure s’éloignait un peu du sujet de base. Mais la surprise pour moi est l'écriture! Car dans ce livre, il s’agit d’une écriture belle et sensible !
Et même si je ne suis d’accord avec certains propos (en tant que  femme mariée et toujours heureuse de l'être), au final, je suis contente de l'avoir lu Parce que la plume de Sophie Fontanel a fait mouche chez moi...
En parlant du yoga : Non, cette discipline n'était pas la mienne : moi j'avais fait le tour des plaisirs solitaires.
Les avis très variés d’Aifelle, Géraldine, KeishaStéphie,  Sylire.
Et une lecture de plus pour le challenge d'Hérisson08.

lundi 12 septembre 2011

arghhhhh!!!! Le nouvel album de Miossec est sorti aujourd'hui

Entre deux je-cours-à-un-RDV et un je-vais-inscrire –une-des-Fifilles-au-cours-de ( d’ailleurs,  on peut se demander si je ne me suis pas transformée en Wonder-Woman depuis la semaine dernière ), j’ai acheté le nouvel album de mon chouchou Miossec qui sort aujourd’hui ! Chansons ordinaires est dans les  bacs mais également maintenant  entre mes mains ( cris de joie  et soupirs d’extase !!!).

Et pour bien continuer, les places pour le concert au Vauban ! Et oui, quelquefois le bonheur finit par "s":

Je suis sereine complètement énervée de découvrir les chansons...  Ca y est, j'ai déchiré enlevé furieusement délicatement l'emballage plastique ! Et, je vous dis à demain !

dimanche 11 septembre 2011

Olivier Sillig - Skoda

Éditeur : Buchet-Chastel - Date de parution : Août 2011 - 102 pages et une claque !

Après un raid aérien meurtrier, Stjepan repend conscience. Ses amis sont morts et  le jeune homme découvre un nourrisson  dans une voiture. La mère n’a pas survécu. Stjepan décide de le prendre avec lui et de s’en occuper.  
Le personnage s’appelle Stjepan, on apprend qu’il est âgé à peine d'une vingtaine d'anées. L’endroit, la région ou le pays ne sont pas nommés. Aucune importance ou tant mieux justement. Ainsi, l'auteur  parvient à donner à ce roman une portée plus profonde. Alors que la guerre frappe, tue et ravage, Stjepan décide de s'occuper de ce bébé. Il le nomme Skoda comme la marque de voiture dans lequel il se trouvait. Sans avoir aucune expérience, il marche vers un pays qui ne peut être que meilleur. Sur sa route, quelques rencontres où la nature humaine se révèle généreuse ou répugnante.  Stjepan se prend de tendresse pour Skoda, il apprend quelques rudiments de base et agit comme un père protecteur.
Dans une écriture concise, l’auteur nous décrit la guerre, les sacrifices, la beauté et la fragilité de la vie. Oliver Sillig s’est débarrassé du superflu pour mieux atteindre le lecteur... Ca fait mal et la page suivante, on a le cœur tout chiffonné par les espoirs de Stjepan ou son regard sur Skoda.

Une lecture en apnée totale, j'ai été ballotée par tout ce qui s'en dégage ! Et en une centaine de pages, je me suis prise une claque ! Admirable...
Olivier Sillig ne se fait pas donneur de leçons. Non, il nous raconte une histoire qui a existé ou qui existe.

Pour un soldat, la meilleure défense, c’est l’attaque. Et l’avion est là pour ça. Alors le pilote, là-bas, à l’horizon, là où le soleil se couche, tire - riposte préventive, c’est sans doute ainsi qu’on justifie toute action militaire.  
Les billets d’Antigone, Cathulu ( un énorme merci !), Stéphie.

vendredi 9 septembre 2011

Rencontre et interview de Carole Martinez pour Du domaine des murmures

Carole Martinez à Brest le 7 septembre 2011

A l’occasion de la parution de son livre Du domaine des murmures, Carole Martinez était à la librairie Dialogues mercredi. Un bonheur pour moi de la rencontrer à nouveau car il y a quelques mois, elle était déjà venue à Brest. Nous avons pu échanger  et parler en tête en tête. J’en ai donc profité pour lui poser quelques questions et comme la technologie fait bien les choses, mon téléphone ( qui n'a toujours pas les multi fonctions d’un couteau suisse)  m'a permis d’enregistrer notre loooongue conversation dont j'ai retranscris une partie.
Quelle a été votre première réaction en  apprenant que Le domaine des murmures figurait sur la liste de sélection du Goncourt ?
C’est juste extraordinaire !  Hier (en parlant de mardi), j’étais chez Gallimard et l’attachée de presse qui s’occupe des prix me l’a appris. Je ne savais pas quel jour avait lieu l'annonce  donc ça été une surprise totale ! Ensuite, mon attaché de presse m’a rappelé en me laissant un message qui me disait que j’étais également citée pour le Renaudot. Et c’est génial…Après, évidemment ce serait effectivement un rêve mais déjà être nommée pour les deux, c’est merveilleux !
Vous saviez qu’avec ce deuxième livre, vous étiez attendue par la presse ?
Pour "le cœur cousu" c’était déjà un tel exploit d’être éditée chez Gallimard que je n'avais même pas  imaginé que le  livre pourrait  avoir un tel succès ! Finalement, la réalité a rejoint le rêve car le livre a continué à vivre dans le temps. Avec "le cœur cousu", j’ai découvert qu’il y avait un tissage et que le bouche à oreille avait fonctionné.  Mais oui, j’étais très tendue à la sortie "du domaine des murmures" car ce qui c’était passé pour mon premier livre était un vrai miracle ! 
Après le cœur cousu, j’ai eu peur de ne plus être capable d’écrire. Et avec ce nouveau livre, je me doutais qu’on allait m’attendre au tournant.
J’ai lu des  critiques presse  avant  de venir et  elles sont unanimes.
Je ne doute plus maintenant du "coeur cousu", j’ai eu tellement de retours magnifiques de personne à personne. Je n’ai pas encore confiance en moi  et je commence à avoir confiance dans le domaine des murmures. J’attends encore un peu car je crains que la 4ème de couverture ne fasse peur, qu’elle donne l’impression qu’on va s’ennuyer avec cette femme, et que le roman soit pris pour un texte religieux ou  historique. Alors qu'il s'agit de nouveau d'un conte.

Je voulais travailler sur cette femme qui est dans quatre mètres carrés, on est au XIIème siècle mais je veux parler d’un éternel humain. Le but était pour moi de creuser cette femme  qui a éliminé l’insignifiant et qui n’a qu’une petite ouverture vers l’extérieur : rentrer dans son intériorité, pénétrer ses sens et faire un travail sur la chair. Car contrairement à ce que l’on peut imaginer c’est un roman sur la chair.  Elle rentre pour l’esprit et finalement se découvre chair, profondément chair.
Alors justement qu’est ce qui est venu en premier le personnage d’Esclarmonde ou l’époque du Moyen-âge ?
Au départ, je voulais écrire un roman contemporain : une jeune femme qui rencontre le châtelain du domaine des murmures en faisant intervenir les  femmes précédentes qui habitaient ce lieu. J’ai cherché  des figures de femmes qui pouvaient m’inspirer et  j’ai découvert l’histoire des recluses qui m’a impressionnée ! 
En plus, le thème de la maternité me tenait à cœur. Dans "le cœur cousu", c’est l’amour d’une fille pour sa mère. Ici,  c’est l'inverse, il s'agit du regard de la mère sur son enfant . Et  puis,  je voulais travailler sur un tout petit terrain au niveau de l’espace car j’ai un petit côté baroque et j’ai l’esprit qui gamberge facilement !
Je me suis dit : dans quatre mètres carrés je vais pouvoir la cerner, entrer en profondeur dans son intimité. Mais elle m’échappe, mes personnages féminins sont des rebelles.
Esclarmonde est très jeune.
En effet, c’est une adolescente. Et à cet âge, on peut se  fabriquer des rêves, des idées qui peuvent nous porter ou nous enfermer.
Avez vous effectué un travail de recherches sur l’époque ?
Oui et j’adore ! Je pourrais rester quinze ans sur un livre car le travail d’écriture est merveilleux ! On fait des rencontres, des découvertes. Mais je n’ai pas voulu écrire un roman purement historique. Le sacrifice des Saint est réel : des villageois les tuaient de peur qu’ils s’échappent ou il y avait des disputes pour garder les reliques des Saints et continuer à bénéficier de leur protection.   J’ai trouvé ça incroyable !
Le choix du XIIème siècle n’était pas innocent alors ?
Le  XIIème m’intéressait car le dogme chrétien y côtoyait le merveilleux des croyances populaires ...   Saints et fées s'entremêlaient dans la conscience populaire. Et, Bérangère,ma fée, est un personnage que j'adore! Elle est  la représentation de la dame Verte : si on se promène au bord de la Loue, on peut encore la rencontrer, elle existe !


Radieuse, passionnée, Carole Martinez a un ce don de s’enchanter et de transmettre son émerveillement autour d’elle ! C'est magnifique !
Un grand merci à Carole Martinez et à Clémence de chez Dialogues. Sur le site de Dialogues, vous pourrez d'ici peu visualiser et écouter une interview filmée de Carole Martinez.

jeudi 8 septembre 2011

Sonya Hartnett- L'Enfant du jeudi

Éditeur : Les Grandes personnes - Date de parution : Août 2011 - 221 pages

Australie, fin des années 1920,  Flute Harper, dix ans, et sa famille habitent dans la campagne. Tin son plus jeune frère frôle de près la mort. A partir de ce jour, il se met à creuser sous la maison. Il y creuse des galeries, y passe ses journées puis très vite ses nuits.

Raconté par Flute, ce livre nous plonge dès le départ dans une ambiance particulière. On ressent la chaleur étouffante, on visualise cette campagne australienne où la famille Harper vit difficilement. L’argent est rare, Flute se contente de porter les robes usées de sa sœur aînée et porte des chaussures trouées. Mais elle ne plaint pas, ses parents l’aiment même si depuis l’arrivée du dernier bébé,  elle trouve que sa mère est bien occupée. Et voilà que Tin creuse sous terre de véritables galeries et y passe tout son temps. Ses parents le laissent faire. Tin délaisse les repas, son lit et sa famille pour vivre sous terre. Flute comme tout le monde ne comprend pas pourquoi il agit de la sorte.  Les saisons passent, Flute grandit. Elle discerne mieux ce qui se cache derrière les conversations des adultes. Sa naïveté s’amenuise, la Grande Dépression s’abat sur toutes les têtes, son frère Tin est devenu un être sauvage et le rêve de son père tourne au désastre. Pour la suite, je n’en dis pas plus…  
Comme je vous le disais au départ, l’écriture de Sonya Hartnett crée une atmosphère. Pas franchement gaie, vous l’aurez compris (ramassez les cotillons) sans être plombante (ramassez la  sinistrose) ou triste ( ramassez les mouchoirs). J'avais juste ( je dis bien juste) l’impression  d’avoir la gorge sèche, du mal à déglutir et un poids qui me comprimait le thorax.
Bien plus qu’un roman initiatique au monde  des adultes, ce livre se lit tout seul en apnée totale avec une histoire très prenante ! Ceux et celles  qui ont aimé une enfance australienne ne seront pas déçus par ce nouveau livre!

Le billet de Cathulu ( merci!).
Mon premier livre classé en littérature "jeunesse"pour le challenge d'Hérisson08.

mercredi 7 septembre 2011

Sofi Oksanen - Les vaches de Staline

Éditeur : Stock - Septembre 2011 - 528 pages percutantes!

Sofi Oksanen avec ce deuxième roman nous livre des histoires de femmes partagées entre l’Estonie et la Finlande. Ce récit alterne présent et flashbacks : la Finlande d’aujourd’hui et l’Estonie sous le régime Soviétique jusqu’à son indépendance.  

Années 1970, Katariina, Estonienne, est une jeune ingénieur. Elle rencontre son futur mari, un Finlandais qui travaille pour l’ambassade à Moscou. Katariina quitte sa famille, son pays pour le suivre en Finlande.. Partagée entre le mal de son pays, la volonté de cacher ses origines, elle est la figure du  déracinement. Un cri profond, lancinant qui est en toile de fonds  de ce roman. Comment trouver sa place ? Elle veut qu’Anna, sa fille,  soit  une « vraie » finlandaise. Anna est une jeune femme qui nous amène au plus profond de l’anorexie-boulimie. Une plongée violente, abrupte dans les entrailles de ce qu’elle appelle son Seigneur. L’obsession des kilos, les calculs et les méthodes pour se faire vomir plus facilement. Son corps est le réceptacle de son  malaise profond : elle porte le poids trop lourd de ce déracinement. En Finlande, elle doit cacher les origines de sa mère qui refuse qu’elle parle sa langue natale. En Estonie, chez sa tante ou sa grand-mère, elle représente un pays riche. Et ce sont autant de pages dures, violentes car aucun détail sur la boulimie n’est épargné au lecteur. Trop d'ailleurs car je me suis sentie mal à l'aise à plusieurs reprises.  
Le mari de Katariina la trompe lors de ses déplacements. Le commerce des prostituées issues de son pays révulse Katariina . Les visites en Estonie sont pour elle l’occasion de ramener des produits qui y font défaut. Chaque voyage donne lieu à des astuces pour cacher des denrées en tout genre à l'aller comme au retour. Puis, on remonte un peu plus le cours de l’histoire jusqu’en 1942. On découvre l’histoire des parents de Katariina: les déportations en Sibérie, la peur et la famine. L'histoire de cette famille sur trois générations  est liée à celle  de l’indépendance de son pays. Un pays qui s’ouvre aux affres  du capitalisme et aux excès en tous genres.  
J’ai trouvé certaines analogies avec Purge. Forcément, vu qu'il s'agit du premier roman rédigé par Sofi Oksanen. Mais ici, l’écriture et l’histoire sont nettement plus fortes et plus incisives poussant le lecteur dans ses retranchements. Violence du déracinement, violence de l’anorexie et de la boulimie… J’ai été secouée et dérangée avec la sensation d’être penchée au bord d’un précipice vertigineux.  La fin m’est apparue brutale laissant  le dernier mot à  Anna. Percutant comme l’ensemble de ce livre...

Le billet du Globe-Lecteur.
Merci à Libfly pour cet envoi !



mardi 6 septembre 2011

Paul Harding - Les foudroyés

Éditeur : Cherche Midi (collection : Lot49) Midi - Date de parution : Avril 2011 - 186 pages

Imaginez un homme qui se meurt entouré de sa femme, de ses enfants et petits-enfants. Cet homme Georges Grosby passionné d’horlogerie se remémore son père Howard.  Howard et sa carriole remplie de bibelots qu’il vendait dans les campagnes du Maine. Ne cherchez pas une chronologie dans ce livre ou  une histoire basée scrupuleusement sur l’ordre des générations de la famille Grosby, il n’y en a pas ! Mais il y a mieux, beaucoup mieux !  
Comme je vous le disais, Georges est sur son lit de mort en proie à des hallucinations (par exemple, il pense que la maison s’effondre). Les jours et  les heures sont décomptés avant que son heure ne vienne. Souvenirs, cauchemar, réalité et passé hantent l’esprit de Georges et sont les bases de ce roman hors normes mais époustouflant ! Un livre qui sort des sentiers battus où la poésie d’Howard, le père de Georges, qui aimait tant admirer la nature côtoie la précision du mécanisme des horloges de Georges. Les personnages sont attachants et semblent proches de nous.   
J’ai juste envie de vous dire : lisez-ce livre, laissez-vous prendre par la main et guider par Paul Harding! Un embarquement immédiat dans une  histoire sur plusieurs générations d’hommes aux vies différentes. Des hommes avec leurs passions et leurs  maux ( et là, le titre du livre convient à merveille). A noter : le livre contient des extraits du Petit horloger raisonné du Rév. Kenner Davenport ( 1783) sur le mécanisme des horloges, sur la recherche et la volonté  de l'homme à vouloir compter le temps. Des extraits comparables à à des petits bijoux...
Une écriture  étonnante par sa beauté et sa précision, Paul Harding transporte le lecteur en moins de deux cents pages ! Le dépaysement est garanti ainsi que la stupéfaction!
Les billets de Jérôme, Keisha, Papillon

lundi 5 septembre 2011

Fanny Saintenoy - Juste avant

Éditeur : Flammarion- Date de parution : Août 2011 - 118 belles pages en toute simplicité...

Deux récits et deux femmes. Juliette est une vieille dame à l’aube de finir sa vie et Fanny, son arrière-petite-fille  tente de construire la sienne. Un siècle les sépare mais outre les liens du sans, les souvenirs les lient.
Voilà une jolie découverte  de cette rentrée littéraire ! Un premier roman qui en toute simplicité laisse beaucoup d’émotions après sa lecture. Juliette attend la mort mais maintenant elle a peur que son heure soit venue. Pourtant, elle a eu (selon l’expression) une longue vie. Mais s’apprêter à partir est difficile.  Elle voudrait encore un peu de temps. Juste un peu. Juliette plonge dans ses souvenirs, remonte le temps dans une langue sans ambages. Elle qui a connu des moments difficiles à réussi à les surmonter grâce à sa gaieté et un optimisme naturel. Fanny est dans le train pour lui rendre visite. Une visite qui s’impose comme un besoin. Trentenaire, elle  vient de divorcer.  Elle aussi convoque le passé.
Deux récits où les souvenirs se croisent, se superposent par instants,  tissent la toile entre cinq générations.  Juliette fait le point sur sa vie. Forcément, il y a des regrets inavoués qui donnent naissances à d'autres vies aux fondements hypothétiques. Mais, les sourires et la gaieté l'emportent. Fanny est la nouvelle la voix féminine de sa famille. Et, chaque génération a apporté une petite pierre à la jeune femme qu'elle est. 
Les époques changent mais les questions sur l’amour, la vie et la mort sont identiques.
On retiendra de ce premier roman une délicatesse émouvante et simple. Et surtout, chacun gardera longtemps des souvenirs émoustillés, teintés d’une nostalgie surannée.
L'autre jour à la télé, j'ai vu un reportage sur une maison de retraite.Une jeune fille adorable, pleine de convictions, venait chanter avec les mémés et elle leur faisait battre le ryhthme avec des grelots ou des claves, je ne sais plus. La salle s'appelait "Espace tendresse", c'était d'une tristesse à vomir.Je ne peux plus voir ce genre de scène, je ne veux plus.
Le billet de Leiloona.
Et un livre supplémentaire pour le challenge d'Hérisson08 !